28 Jan L’année où mon sourire était mon objectif!
C’est une de mes photos préférées. Ce n’est pas la photo où je suis la plus belle, mais c’est la photo où je m’aime le plus. Elle traduit bien ma personnalité. Ce sourire sincère, grand, avec plein de dents, les lèvres un peu croches. C’est moi.
Je me souviens du jour de cette séance photo. C’était après ma qualification pour les Jeux olympiques de Londres. Elle a été prise une des années les plus difficiles de ma vie. L’anxiété avait occupé une grande place dans ma vie en 2011 et là, en avril 2012, j’allais mieux, je reprenais des forces.
En vue des Jeux de Londres, mon sourire était important. Il faisait partie de mon objectif. Si j’étais capable de sourire avant ma course, c’est que j’étais capable de profiter de mon moment olympique. Si je souriais après ma course, c’est que j’étais fière de moi.
Dans cette photo, on voit le sourire dans mes yeux, mes yeux allumés, vifs, pleins de vie. Je sais que lorsque j’étais envahie par l’anxiété, que je prenais des médicaments, mes yeux étaient plus hagards, moins allumés, moins pétillants.
En cette journée d’avril 2012, je me sens bien, je suis bien entourée, je me sens mieux et je l’apprécie. C’est ce que je vois en regardant ce cliché.
Aujourd’hui, comme tout le monde, je vis de l’anxiété parfois. Peut-être un peu plus intensément que la moyenne des gens, je ne sais pas…
La saison 2011-2012 a été ma petite tempête à traverser, mais je l’ai très bien fait, j’en suis fière. C’était aussi une leçon d’humilité pour moi, une performante qui aime bien s’«arranger» toute seule. Toutefois, en 2012, je n’aurai jamais été en mesure de me qualifier pour mes deuxièmes Jeux olympiques sans l’aide de mes parents, de mon entraîneur Ben et mes coéquipiers. Je me sentais faible, fragile, j’avais besoin que l’on fasse attention à moi. Je réalise maintenant que, oui, j’étais plus fragile émotionnellement, mais j’ai aussi été très forte.
À Londres, j’ai réalisé mon objectif. Je savais que cette expérience olympique ne prenait son sens que si j’avais du plaisir à faire ma course. J’ai toujours aimé l’ambiance des grandes compétitions, plus le spectacle était gros, plus j’avais du plaisir. Malgré le stress de la demi-finale, je suis parvenu à profiter du fait que je nageais ma course préférée dans la plus grosse compétition possible. Et j’étais très fière de mon résultat et j’étais très heureuse de partager ce moment avec mes coéquipiers du Centre d’entraînement de Montréal, restés à la piscine pour m’encourager.
Depuis la vie de ma carrière sportive, il y a à certains moments un peu plus de vagues dans mon quotidien. Pour faire face à mes nouveaux défis, je me rappelle cette année 2012. Je me rappelle que je suis forte, que j’ai relevé d’autres défis avant. Et je me souviens aussi qu’être forte, c’est de demander de l’aide et d’accepter d’être aidé.
Maintenant, je comprends mieux comment l’anxiété m’affecte. J’ai mes stratégies et outils pour être en mesure d’être bien, même lorsque c’est plus difficile. L’anxiété une fois apprivoisée n’est plus un obstacle, mais un don. Un don qui m’aide (ou m’oblige) à être à l’écoute de mes émotions. C’est un système d’alerte qui me permet de comprendre les endroits, les personnes, les situations où je suis inconfortable. Si je suis suffisamment à l’écoute, je peux aussi détecter ce qui me fait sentir bien, les défis qui me stimulent, les vagues dans lesquelles je suis prête à nager, tout comme les lacs calmes où j’aime me reposer. Mon don me permet de sentir des choses qui échappent à mon côté rationnel, incapable de tout analyser.
Par contre, comme tout le monde, je n’écoute pas toujours les signes qui me sont envoyés.
En 2019, mon objectif est d’utiliser davantage mon don, de m’écouter. D’écouter ma tête bien sûr, mais aussi mes émotions. Je sais que je serai bien guidé.
Ce sourire, ce regard rieur, c’est moi. C’était mon objectif l’année où j’ai eu une tempête à traverser, c’est aussi mon objectif pour la prochaine année.
Je vous souhaite à tous beaucoup de sourires sincères.
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